Les femmes et les TIC

La version originale de cet article a paru dans la revue Le Manager, le Mensuel de l'Entreprise,  

No. 96, juillet 2004, page 55


Par Mohamed Louadi, PhD

 

Comme beaucoup d’autres dans le monde en développement, les femmes arabes sont les premières à s’occuper des autres. Souvent des éducatrices à l’école, au lycée ou à l’université, elles le sont en plus chez elles, avec leurs propres enfants.

 

Quelques pionnières de l’informatique…

Ada Lovelace

Grace Hopper

Mildred Koss

 

C’est donc que partout dans le monde, les femmes aspirent à une vie meilleure, pour elles-mêmes et pour leurs familles.

 

Beaucoup y arrivent et réalisent des performances remarquables malgré des vents contraires.

 

L’entrée de la femme dans la force ouvrière ne s’était faite que durant les guerres, particulièrement lors de la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945). Les contrecoups sur la société ont été multiples et, du coté des technologies, notamment informatiques, des femmes comme Grace Hopper [1], et Mildred Koss [2] emboîtèrent le pas à Ada Lovelace, et sont devenues les pionnières de l’informatique les plus connues. Aujourd'hui, plus de femmes travaillent que jamais auparavant. En 2003, 2,8 milliards de personnes avaient un emploi dont 1,1 milliard de femmes [3], Malheureusement, les différences les plus marquées sont encore observées dans le Monde arabe où le taux de chômage des femmes était de 6% supérieur (11% contre 17%) à celui des hommes où pour chaque 100 hommes, il y avait 36 femmes «économiquement actives» (incluant des femmes en âge de travailler mais ne voulant pas le faire) quoique la situation soit de loin meilleure qu’auparavant. De même, au niveau mondial, 108,1 millions d’hommes étaient chômeurs en 2003 alors qu’ils étaient 600.000 en 2002. Une légère diminution de chômeurs a néanmoins été enregistrée chez les femmes qui passent de 77,9 millions en 2002 à 77,8 millions en 2003.

Alors que les projets de formation des femmes aux technologies de l’information et de la communication abondent désormais, il est malheureux de constater que, la plupart du temps, ces formations se limitent à quelques rudiments de traitement de texte, l’application la plus utilisée par les secrétaires, alors que les technologies de l’Internet sont plus à même de s’adapter aux personnalités féminines telles que la propension à la communication [4] Mais des programmes tels que celui lancé par Cisco récemment semblent bien plus prometteurs [5].

Mais est-ce que les femmes demandant réellement un emploi sont prêtes à épouser une carrière en TIC ? Les recherches effectuées à Carnegie Mellon University révèlent que la perception des femmes envers les TIC peut changer. Par exemple, les étudiantes en informatique sont plus intéressées par le «contexte» des TIC; 44% des femmes interrogées s’intéressent à l’informatique lorsque celle-ci est liée à une application, contre 9% des hommes qui s’intéressent à l’informatique… pour l’informatique. Les femmes sont préoccupées par l’utilité de leurs compétences informatiques et soucieuses de relier les notions acquises aux problèmes réels  [6] Ces recherches confirment en fait des résultats obtenus presque une décennie plus tôt mettant l’accent sur les aspects pragmatiques de l’enseignement de l’informatique et des TIC afin de toucher hommes et femmes [7] Après avoir tenu compte de ces recommandations, les programmes de l’université avaient été remodelés et, quatre ans plus tard, la proportion des femmes inscrites dans les programmes d’informatique était passée de 8% in 1995 à 37% en 1999 [8]


[1] Voir l’autobiographie de Grace Hopper dans Hopper, G.M. (1987). The Education of a Computer, IEEE Annals of the History of Computing, Vol. 9, No. 3/4, juillet-décembre, pp. 271-281.

[2] Voir Koss, A.M. (2003), Programming on the Univac 1: A Woman’s Account,” IEEE Annals of the History of Computing, Vol. 25, No. 1, janvier-mars, pp. 48-59.

[3] BIT (2004). Global Employment Trends for Women 2004, Bureau International du Travail, mars 2004.

[4] Taggart, N. et O'Gara, C. (2000). Training Women for Leadership and Success in IT, Academy for Educational Development, http://www.worldbank.org/gender/digitaldivide/techknow.pdf, consulté le 13 juin 2004.

[5] Le programme de bourse du Cisco Networking Academy: Women In Technology est sponsorisé par la United States Agency for International Development (USAID) et administré par le Institute of International Education (IIE). Grâce à une subvention du programme Dot-GOV de Internews Network, le programme octroie des bourses aux candidates originaires de Tunisie, d’Algérie et du Maroc, leur permettant de s'inscrire au programme Cisco Networking Academy et d'obtenir une certification Cisco Certified Network Associate (CCNA). Le programme enseigne la conception de site Web, la conception de bases de données, la câblage, la programmation en Java et en UNIX, etc. Voir davantage sur le site de Women In Technology Scholarship Program (WIT): www.iie.org/wcoast/wit.html.

[6] Margolis, J., Fisher, A. et Miller, F. (1999). Caring about Connections: Gender and Computing, School of Computer Science, Carnegie Mellon University, p. 3.

[7] Rosser, S. (1990). Female Friendly Science.

[8] Margolis, J. et al. (1999), opcit, p.2.